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Tunisie : Kaïs Saïed, la Commission de Venise et les gondoles

Dans une vidéo publiée par la présidence tunisienne, Kaïs Saïed fustige la Commission de Venise, qui estime que le référendum du 25 juillet prochain doit être reporté.

« Elle doit s’occuper de ses gondoles et le peuple tunisien ne peut être dirigé par ceux qui dirigent les gondoles ». Au moment d’évoquer la Commission de Venise, le président tunisien Kaïs Saïed ne mâche pas ses mots. Le président de la République, alors qu’il recevait, ce lundi, son ministre des Affaires étrangères, Othman Jerandi, a indiqué que « la commission de Venise est persona non grata en Tunisie ». Pour Saïd, la souveraineté de la Tunisie « n’est pas à négocier ».

La raison de ce courroux ? Un rapport qui passe mal. Le document de la Commission de Venise fustige l’organisation, le 25 juillet prochain, d’un référendum sur la Constitution. Le 27 mai, la commission a émis un « avis urgent sur le cadre constitutionnel et législatif concernant le référendum et les élections annoncés par le Président de la République », sur demande du « Service européen d’action extérieure, introduite par l’intermédiaire de la Délégation de l’Union européenne en Tunisie ».

Dans ce document d’une vingtaine de pages, la Commission de Venise ne se prononce pas sur la question de la légitimité de modifier la Constitution mais affirme « qu’il n’est pas réaliste de prévoir d’organiser de manière crédible et légitime un référendum constitutionnel le 25 juillet 2022, en l’absence — deux mois avant la date prévue pour la consultation — de règles claires et établies bien à l’avance, sur les modalités et les conséquences de la tenue de ce référendum et surtout en l’absence du texte de la nouvelle Constitution qui sera soumis au référendum ».

« Pour qui se prennent-ils ? »

Un avis qui n’est pas contraignant pour Tunis : la Commission de Venise, qui est une « Commission européenne pour la démocratie par le droit », est un simple organe consultatif du Conseil de l’Europe, qui touche aux questions constitutionnelles.

Mais la critique n’est pas passée auprès de la présidence tunisienne. Kaïs Saïed s’est montré pour le moins virulent : « Pour qui se prennent-ils ? Sont-ils nostalgiques de l’ère de Jules Ferry ? Ils disent vouloir nous apprendre… Ils n’ont rien à nous apprendre », s’est emporté le chef de l’Etat qui affirme ne pas avoir « besoin de leur accompagnement et de leur aide ».

Une envolée qui s’est accompagnée de menaces : « Si un membre de cette commission se trouve en Tunisie, qu’il quitte immédiatement », a en effet indiqué Kaïs Saïed, qui dénonce par ailleurs « une ingérence flagrante inadmissible sur tous les plans ». Pour le président, la Tunisie « n’est ni une ferme, ni un pré » appartenant à l’Europe.

On est loin des relations cordiales d’autrefois entre Carthage et la Commission de Venise. Le 1er avril dernier, le président de la République Kaïs Saïed avait reçu la présidente de la commission, Claire Bazy-Malaurie, dans le but de « consolider la coopération entre la Tunisie et ladite commission », selon un communiqué du palais présidentiel.

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