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Les pays africains privés de droit de vote à l’ONU

ONU vote

Chaque année, les pays voient leur droit de vote aux Nations unies suspendu pour cause de cotisations impayées. Six pays africains sont concernés. Mais les raisons profondes sont plus complexes.

Une note signée par António Guterres, secrétaire général des Nations unies, annonce qu’« onze Etats membres sont en retard » du paiement de leurs dettes à l’ONU. Or, selon l’article 19 de la Charte des Nations unies, les Etats n’étant pas à jour de leurs cotisations perdent automatiquement leur droit de vote à l’Assemblée générale de l’ONU.

L’article stipule qu’« un Membre des Nations Unies en retard dans le paiement de sa contribution aux dépenses de l’Organisation ne peut participer au vote à l’Assemblée générale si le montant de ses arriérés est égal ou supérieur à la contribution due par lui pour les deux années complètes écoulées ».

Parmi les onze Etats concernés, six sont africains, à savoir la Somalie, le Soudan, le Congo, les Comores, São Tomé et Príncipe, et la Guinée.

Des dérogations pour certains pays

L’année dernière, déjà, l’ONU avait menacé de priver certains de ces pays, et d’autres pays africains qui, depuis, ont réglé leur dû, de leur droit de vote à l’Assemblée. En janvier 2021, le Niger, le Soudan du Sud, le Zimbabwe, la République centrafricaine et la Libye étaient sur la liste, mais sont désormais à jour de leur contribution.

Trois pays — les Comores, São Tomé et Príncipe, et la Somalie — avaient réussi à obtenir un sursis. Selon les règles de l’ONU, si le défaut de paiement est dû à « des circonstances indépendantes de la volonté » des Etats, ces derniers conservent leur droit de vote pendant un an.

Mais l’aspect financier n’est pas le seul à entrer en compte. En réalité, les montants en question ne sont pas très élevés à l’échelle d’un Etat. Souvent, ces mesures touchent en effet les pays mal-aimés par l’Occident.  Le vrai souci réside dans la procédure, altérée par les sanctions et la bureaucratie onusienne.

A titre d’exemple, l’Iran et le Venezuela, dont les fonds étaient bloqués par le Trésor américain début 2021, ont dû négocier des modalités de paiement alternatives pour un montant cumulé de 58 millions de dollars.

Les six pays africains concernés en ce début d’année 2022 sont débiteurs de montants qui varient entre 130 000 dollars et 2 millions de dollars chacun.

Un chantage de l’ONU

Ce que la note de Guterres et les règles de l’instance qu’il dirige n’expliquent pas, cependant, c’est la véritable raison pour laquelle ces pays sont dans l’incapacité de de payer leurs cotisations. Dans le cas de la Somalie, par exemple, les sanctions onusiennes empêchent l’ONU de percevoir des fonds de la part des banques nationales du pays. C’est le cas également pour la Guinée, qui en est à sa deuxième année de cotisations impayées, alors que le pays est en pleine transition à la suite du coup d’Etat qui a donné lieu à des sanctions.

Pour le Congo, ce sont les négociations avec le Fonds monétaire international (FMI), qui sont actuellement au point mort, qui mettent un frein à l’émission de fonds en direction des Nations unies.

Un chantage à peine voilé, donc, dans lequel l’ONU joue le rôle de victime, alors que la menace envers les Etats africains concernés est claire.

La perte du vote onusien est un coup dur, diplomatiquement parlant, qui peut altérer la réputation de certains pays qui dépendent de leur diplomatie pour la promotion d’enjeux économiques et géopolitiques majeurs.

Pour certains analystes, il s’agit surtout de la pression américaine et occidentale en général, sur les pays qui diversifient leurs partenariats diplomatiques et qui risquent de voter contre des motions occidentales à l’Assemblée générale de l’ONU. Les Etats-Unis tentent notamment de bloquer l’expansion chinoise et russe sur le continent.

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