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Guinée-Bissau : les ambitions africaines d’Umaro Sissoco Embaló

Après avoir assisté au sommet de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), le président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló a reçu, ce dimanche, son homologue congolais Félix Tshisekedi.

Le sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), samedi 18 juillet, a été marqué par la présence du président bissau-guinéen Embaló. Un sommet qui s’est tenu à Luanda, la capitale angolaise. La présence de la Guinée-Bissau a été un mini-événement. Car un an plus tôt, Umaro Sissoco Embaló avait lourdement critiqué son homologue angolais, João Lourenço, allant jusqu’à le qualifier de « vendu ». Les conséquences diplomatiques avaient été lourdes : Lourenço avait ensuite refusé les lettres de créance de l’ambassadrice bissau-guinéenne.

Cette hostilité entre les deux chefs d’Etat n’est pas nouvelle. Lourenço avait d’ailleurs ouvertement appuyé le candidat Domingos Pereira, opposé à Embaló lors de la présidentielle bissau-guinéenne de 2019. Toutefois, les relations entre les deux présidents semblent devenir plus cordiales. Si Embaló s’est rendu à un sommet de la communauté africaine lusophone, on peut deviner que ce n’est pas simplement pour représenter la Guinée-Bissau. Le chef de l’Etat serait-il en train de préparer une percée diplomatique sur le continent, lui qui s’est souvent placé à la marge ?

Le lendemain, c’est à Bissau qu’Embaló est réapparu. De retour dans son pays, il a cette fois été vu en compagnie du président de la République démocratique du Congo (RDC) et de l’Union africaine (UA), Félix Tshisekedi. Le président de la Guinée-Bissau a décoré Tshisekedi de la médaille Amilcar Cabral, la plus haute distinction de la Guinée-Bissau.

Un Embaló plus diplomatique ?

Le président de la Guinée-Bissau a, semble-t-il, décidé de faire son retour dans la diplomatie africaine. Depuis son début de mandat, l’inflexible Embaló n’a pas eu beaucoup de soutien de la part de ses homologues, à l’exception de Macky Sall, Muhammadu Buhari ou encore Adama Barrow. Sa querelle avec Lourenço avait été jusqu’à provoquer un isolement diplomatique de la Guinée-Bissau au niveau continental. Le président bissau-guinéen n’a pas la langue dans sa poche et il n’avait pas hésité à donner, à Jeune Afrique, deux interviews coup de poing dans lesquelles il égratignait Alpha Condé, Alassane Ouattara ou encore les putschistes maliens. Embaló n’avait pas hésité à critiquer les présidents qui cumulaient les mandats en affirmant que « l’Afrique ne devrait plus avoir affaire à des Mugabe ». Désormais, le président bissau-guinéen commence à reconnaitre l’importance de développer des coopérations avec des Etats d’Afrique centrale ou d’Afrique de l’Est.

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Le passage d’Embaló à Luanda a été plutôt discret. Toutefois, il contraste avec un boycott de la CPLP. Le XIIIe sommet des chefs d’Etat des pays lusophones a d’ailleurs été l’occasion pour Embaló de montrer sa volonté d’être sur deux fronts : d’un côté, le sommet a fait signer un accord sur la mobilité entre les Etats-membres. Un accord très important dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Deuxièmement, une réconciliation entre Embaló et Lourenço serait un vrai message envoyé, surtout lorsque l’on sait la prépondérance du chef de l’Etat angolais dans plusieurs dossiers africains. Notamment ceux de la crise au Mozambique et de la réconciliation de la Centrafrique avec la communauté internationale.

Quant à la décoration de Félix Tshisekedi, le lendemain, elle peut permettre d’envisager un retour de la Guinée-Bissau au sein de l’Union africaine. L’adhésion de la Guinée-Bissau avait été suspendue en avril 2012, après un coup d’Etat. Or, l’UA a aujourd’hui besoin du plus grand consensus possible pour peser sur la scène internationale. Notamment en ce qui concerne les transitions libyenne, malienne et tchadienne, qui connaissent encore beaucoup de tiraillements et d’ingérences étrangères. Dans ce cadres, l’appui d’Embaló est primordial. Et le président bissau-guinéen aurait sûrement tout à gagner à montrer une facette de lui plus diplomate.

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